Situation du CUEF de Perpignan

Publié le par Armelle

 Voici une situation particulière qui ne l'est pas tant que ça et devrait nous inciter à réfléchir sur notre futur statut.

Bon courage à tout le monde en cette période de partiels !

Planté au beau milieu du campus, à côté de la cafétéria Aquarium, le Centre Universitaire d'Etudes Françaises (CUEF) de Perpignan a pour vocation d'accueillir les étudiants étrangers désireux d'apprendre et d'approfondir leurs connaissances en langue et culture françaises. 
 Implanté depuis près de vingt ans, son essor s'est cependant réalisé presque à l'insu de la plupart des usagers de l'université. Néanmoins, ce service accueille depuis plus de cinq ans quelque cinq cents étudiants sur l'année universitaire et environ trois cents l'été. 
 Une équipe d'environ vingt enseignants spécialisés dans la discipline du Français Langue Etrangère (formation/diplômes FLE + expérience professionnelle) travaille à temps plein annuellement pour répondre à la demande des cours de langue et culture de ces étudiants jeunes et adultes. 
 
 
 L'objet de ce texte est de vous informer sur les conditions de recrutement et de travail des membres de cette équipe dont voici rapidement le parcours de ces dernières années :
 Jusqu'à il y a trois ans à peine (2004), de ces vingt professeurs, deux seulement étaient titulaires ; depuis trois ans, deux vacataires historiques ont intégré la fonction publique via le concours interne de la loi Sapin, suivi d'un véritable parcours du combattant pour être nommées au CUEFP ; ce qui porte à 4 le nombre de titulaires de ce service, plus une enseignante envoyée par le Ministère. 
 Les 16 autres étaient majoritairement personnels sans contrat, employés à temps plein et rémunérés au dessous du tarif TD (par le biais de calculs complexes visant à réduire les heures réelles effectuées et le tarif). On les appelle pudiquement « vacataires à temps plein » et on les maintient sous pression en les plaçant dans la position impossible de réunir les conditions d'un « vrai vacataire » : ils doivent en effet justifier d'un emploi principal à temps plein ailleurs, tout en effectuant entre 12 et 25 heures (supplémentaires) d'enseignement par semaine au CUEF, été comme hiver. Ce qui est matériellement impossible. Il faut donc imaginer que les attestations d'emploi principal fournies sont fausses, et que cela ne trouble pas l'Université. Ce qui est d'ailleurs officieusement reconnu par les différents directeurs que le CUEF a connus. 
  Action syndicale et bonne volonté de la présidence aidant, nous avons obtenu, en mars 2004, quatre contrats annuels d'enseignants dits « emplois gagés » et cinq contrats annuels dits « d'établissement » (ceux-ci de 557h au tarif de 25 euros net de l'heure).  
 A la rentrée 2005, deux des enseignants sur ces contrats sont partis, mais il a été impossible d'obtenir que ces deux contrats soient utilisés en faveur de deux « vacataires à temps plein » travaillant depuis 4 et 5 ans dans le service, sous prétexte que la Cour des Comptes ne voulait pas de ces contrats ! Or, le rapport de cette Cour dénonce « l'absence de base légale » de ces contrats mais pas les contrats, et dénonce les « bases juridiques irrégulières de l'emploi de certains vacataires » , situation qui n'a précisément pas changé et qui n'est pas remise en cause tout au contraire.
 En effet, cette année, le CUEF a employé six enseignants « vacataires à temps plein », devant justifier d'un emploi principal tout en couvrant entre 300 et 500 h d'enseignement chacun sur l'année dans notre service ! 
 Quant aux « contractuels », à temps plein (5 à 384h/an et 3 à 557h/an, avec des salaires inversement proportionnels : plus on fait d'heures, moins on est payé), certains sont menacés de perdre leur emploi : faisant fi des recommandations de la Cour des Comptes et sans convoquer la Commission de recrutement du CUEF sur ce point précis, notre directeur supprime, sans plus de formalités, les contrats d'établissement. 
 L'objectif de cette « restructuration » de l'équipe pédagogique est de remplacer tous ces « sous-enseignants » (lisez : non fonctionnaires) par de « vrais enseignants » (lisez : fonctionnaires), titulaires d'un poste dans le secondaire auxquels ne sera exigé ni d'être diplômés en FLE, ni expérimentés dans ce métier (car cela en est un). 
 Notre centre a par ailleurs l'ambition d'obtenir la labellisation qui comporte une charte de qualité laquelle vérifiera, entre autres, la qualification et les conditions de recrutement des enseignants. Si notre centre ne l'obtient pas, il perd sa justification nationale et internationale. Il en va donc de l'avenir du service et pas seulement de l'emploi de ces personnels. Or, nous n'ignorons pas combien sont utiles nos étudiants étrangers pour remplir les filières de l'université et de l'IUT (1/3 d'étudiants étrangers sur l'ensemble de l'université). 
 
 
 Les étudiants paient leurs études de français très cher (1500 euros pour deux semestres et 800 pour un seul) et par conséquent sont en droit d'exiger des prestations d'enseignement d'un certain niveau de qualité ! ... ils sont déjà scandaleusement maltraités quant aux prestations matérielles (salles et équipement pédagogique).
 
 
 De plus, ce projet n'est pas viable pour les raisons « comptables » suivantes : à l'heure actuelle, 3591h annuelles minimum sont assurées par les contractuels; 3000 h environ par les vacataires à temps plein; et 528 h maximum par les vrais vacataires (4h hebdomadaires en moyenne sur 22 semaines) face aux 1920h (384 h annuelles) des 4 titulaires + la ministérielle absente toute cette année. Il faut ajouter les heures supplémentaires que les besoins du service exigent.
 Combien faudrait-il de vrais vacataires (4h à 6h/s) pour assurer les 1671 h de cours qu'effectuent les 3 enseignants contractuels dont notre directeur veut se débarrasser ? Et combien en faudra-t-il pour compenser la régularisation indispensable des vacataires à temps plein?
 
 
 D'autre part, puisqu'un vacataire légal a un emploi principal auquel va de fait sa plus grande disponibilité, il reviendrait alors aux seuls 4 titulaires + 4 ou 5 contractuels (selon les calculs de notre directeur) d'assumer les tâches pédagogiques (en sus des cours) que nous partageons à 20 habituellement et qui justifient notre "coût salarial". 
 
 
 Enfin, en l'absence de perspectives de titularisation étant donné que notre filière ne bénéficie pas de concours, nous ne demandons que la reconnaissance de notre professionnalisme et de nos diplômes, par des conditions de recrutement légales.
 Nos exigences se limitent à 10 CDDs de trois ans, assis sur les bases légales pour les non titulaires de la fonction publique (loi 84-16 du 11 janvier 84 et décret 86-83 du 17 janvier 86). 
 Nous ne résorberons grâce à ces contrats que partiellement l'irrégularité des recrutements et n'obtiendrons au mieux qu'une précarité moins stressante ! Le recours aux vacataires recrutés dans le cadre du décret n° 87-889 du 29 octobre 1987 modifié en 2004, sera de toute façon nécessaire pour pallier le reste des nécessités du service... dans l'attente que le service fonctionne un jour avec une majorité de titulaires (ce qui suppose que l'université demande des postes pour le CUEF et que des concours internes soient proposés).
 Mais, cette légalité « minimale » offrirait au service une base relativement stable de 15 personnels (les titulaires + 10 contrats) qui lui permettrait un fonctionnement pédagogique cohérent à moyen terme de ses 20-25 groupes d'étudiants. 
 
 
 Or, notre directeur, mandaté par la présidence de l'université qui reste muette, refuse d'envisager cette solution, avançant comme argument principal l'absence de « technicité spécifique » du travail de son personnel enseignant. 
 
 
 Nous ne sommes pas la seule université à posséder un CUEF. Et d'autres CUEF que le nôtre ont opté pour des contrats assis sur ces bases légales, à Nancy et à Strasbourg qui vient même de ratifier des CDI. Bien sûr, d'autres CUEF que le nôtre pratiquent ce que d'aucuns appelleraient l'esclavage moderne. La différence est celle de la bonne volonté : 
 On peut choisir le moindre mal en restant fidèle à une certaine éthique ou préférer le pire, pour respecter l'esthétique d'une certaine modernité à savoir résoudre le problème en en supprimant les données.
 
 
 En espérant vous avoir présenté assez clairement, bien que longuement, la situation, je vous remercie de votre patiente lecture d'une réalité si inconcevable sur notre campus ! 
 
 
 Précairement vôtre,
 Marie Blaise, Enseignante contractuelle, à temps plein depuis 5ans et demi au CUEF de Perpignan
 
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